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Photo du rédacteurGRANDJANIN Annie

"Cesária Evora, la diva aux pieds nus": un portrait intime et captivant



(c) Pierre René-Worms

Pour le monde entier, elle était une véritable icône, mais pour le peuple du Cap-Vert, elle était tout simplement "Cize". Dans le film documentaire "Cesária Evora, la diva aux pieds nus", dans les salles mercredi 29 novembre, la réalisarice et productrice portugaise Ana Sofia Fonseca s'est attachée à dévoiler des pans méconnus de son parcours chaotique jusqu'à sa disparition le 11 décembre 2011.

Réalisé à partir d'images d'archives inédites, d'enregistrements originaux de chansons et de témoignages tels ceux de son producteur José Da Silva, de Janette sa petite-fille ... sans oublier le bel hommage du chanteur brésilien Seu Jorge, ce biopic plein de pudeur ne fait pourtant pas l'impasse sur son addiction à l'alcool et les épisodes dépressifs l'obligeant à rester cloîtrée dans sa chambre.

Pourtant, c'est par un rire sonore que Cesária nous cueille au début du film , pendant l'enregistrement de l'album "Voz d'Amor", lorsqu'elle interpelle un homme en lui disant que filmer ses pieds coûte une fortune !

De fortune, il ne sera pas vraiment question dans la vie de celle que l'on surnommait aussi "La reine de la Norma", dont le rêve le plus fou était juste d'acheter une maison dans son village natal de Mindelo.


(c) Antonio Teixeira

"Elle a une voix unique, enracinée dans un territoire nu, qui vient des tripes" commente le journaliste Bouziane Daoudi. Une voix qui saisit José Da Silva, lorsqu'il la découvre dans un petit bar au coeur de Lisbonne. Ancien cheminot, il décide de devenir son producteur dans les années 80. Des débuts difficiles car, comme il l'explique, si les maisons de disques tombent sous le charme de son timbre envoûtant, il est nettement rompu lorsqu'il montre les photos de son artiste.

Au fil de ce documentaire, on découvre des images de sa vie au quotidien, vêtue d'une simple robe en coton, mais aussi de l'orphelinat où sa mère la confiera après la mort du père alors que Cesária a tout juste 7 ans. Un établissement dont elle fuguera régulièrement. "La liberté était dans sa nature" commente alors l'une de ses amies d'enfance. Car s'il y a un bagage que la femme brandira toute sa vie, c'est bien cette liberté qui lui permet de fouler pieds nus les grandes scènes internationales, de prendre des pauses en concert, le temps de fumer et de boire un whisky, de redistribuer le produit de la vente de son concert à l'Olympia pour aider les plus démunis ou de faire venir dans sa loge de l'Hollywood Bowl, une marmite de cachupa, le plat national du Cap-Vert.

Celle aussi, pour cette femme engagée, de connaître son premier grand succès en 1992, alors qu'elle a plus de 50 ans, avec "Sodade". Une chanson extraite de l'album "Miss Perfumado", qui raconte tout de même l'un des plus douloureux épisodes de l'histoire capverdienne, celui des esclaves obligés d'aller travailler dans les plantations.

Quant à la dernière séquence, filmée après la disparition de Cesária Evora, elle montre une foule dansante affublée de costumes colorés et de tee-shirts affichant le visage de cette bouleversante ambassadrice, dont l'aura a permis de situer son archipel sur la carte du monde.

Un portrait intime et captivant qui vient notamment de remporter le Prix du Public de la compétition documentaire au Festival 2 Cinéma de Valenciennes



-Dans les salles le 29 novembre 2023 (Epicentre Films).

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